Un chiffre brut : en France, 11 millions de personnes vivent avec une affection de longue durée, bénéficiant d’un régime d’exception pour leurs soins. Une mécanique à la fois protectrice et rigoureuse, qui ne laisse rien au hasard.
Entrer dans le cercle des bénéficiaires d’une ALD, c’est accepter un suivi médical régulier et s’engager dans un parcours administratif balisé. Tout commence dans le cabinet du médecin traitant : il évalue la situation, monte un dossier, puis la Sécurité sociale tranche. Rien n’est automatique, chaque dossier passe sous l’œil d’un médecin-conseil.
L’ALD en France : comprendre le dispositif et ses enjeux pour les patients
Le terme affection de longue durée (ALD) recouvre des maladies qui s’installent, s’étirent dans le temps, et dont le traitement pèse lourd dans la balance financière. Deux grandes catégories structurent ce dispositif : ALD exonérante et ALD non exonérante. La première ouvre la voie à une prise en charge intégrale des soins relevant de la maladie reconnue, supprimant le fameux ticket modérateur. La seconde, plus restrictive, donne accès à quelques aménagements, comme l’arrêt de travail prolongé ou la prise en charge de certains transports, mais sans la gratuité totale des soins.
Tout est encadré, balisé par l’Assurance maladie. Pour obtenir le statut, il faut que la maladie figure sur la liste officielle ou qu’elle remplisse des critères de gravité et de durée bien définis. Le médecin traitant analyse, rédige un protocole de soins précis, puis envoie la demande au médecin-conseil de la Sécurité sociale. C’est ce dernier qui accorde ou non le statut d’ALD.
Derrière la prise en charge à 100 %, d’autres droits peuvent s’ouvrir. Certaines ALD provoquent une invalidité durable, permettant d’accéder à la pension d’invalidité, à l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI) ou à l’allocation aux adultes handicapés (AAH). La carte mobilité inclusion (CMI), délivrée par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), vient aussi alléger le quotidien des malades et de leurs proches.
Les implications pour le patient
Plusieurs aspects pratiques méritent l’attention lorsqu’on vit avec une ALD :
- Le rôle de la complémentaire santé et de la mutuelle : elles couvrent les frais restants après l’intervention de l’assurance maladie, notamment pour les soins non pris en charge à 100 %.
- Le protocole de soins détaille les actes remboursés en totalité, mais le reste des soins reste soumis aux taux classiques.
- Un traitement complexe ou long nécessite parfois une ordonnance bizone. Celle-ci sépare clairement les prescriptions remboursées à 100 % de celles qui ne relèvent pas de l’ALD.
Voici la liste officielle des 30 maladies reconnues en affection longue durée (ALD)
La liste des 30 maladies reconnues en affection de longue durée (ALD) constitue le socle du dispositif d’exonération du ticket modérateur. Ces pathologies, regroupées sous le nom d’ALD 30, répondent à des critères de gravité et de chronicité. Leur reconnaissance implique une surveillance médicale soutenue, des traitements spécifiques et, le plus souvent, une adaptation du mode de vie. Si la maladie ne figure pas dans cette liste, deux autres catégories existent : ALD 31 pour les maladies graves hors liste, ALD 32 pour les situations de polypathologies invalidantes.
Voici les affections concernées, selon le décret en vigueur :
- Accident vasculaire cérébral invalidant
- Maladie d’Alzheimer et autres démences
- Paraplégie, tétraplégie
- Affections psychiatriques de longue durée
- Insuffisance cardiaque grave
- Insuffisance respiratoire chronique grave
- Diabète de type 1 et 2
- Épilepsies graves
- Cancers (tumeurs malignes, leucémies, etc.)
- Sclérose en plaques
- Hémophilies et troubles graves de la coagulation
- Infection par le VIH
- Maladie de Parkinson
- Insuffisance rénale chronique grave
- Polyarthrite rhumatoïde évolutive
- Lupus érythémateux disséminé
- Myopathies graves
- Maladies métaboliques héréditaires
- Mucoviscidose
- Thalassémie majeure
- Syndrome drépanocytaire majeur
- Hépatite chronique active
- Maladies rares nécessitant un traitement continu
- Maladie de Crohn et rectocolite hémorragique
- Autres pathologies définies par décret
Être reconnu en ALD 30, c’est accéder à une prise en charge à 100 % de tous les soins en lien avec la maladie, traitements innovants compris. Plus besoin d’avancer la part obligatoire : tout ce qui est directement rattaché à l’affection est couvert, des examens de suivi aux actes techniques pointus.
Quelles démarches entreprendre pour bénéficier d’une prise en charge à 100 % ?
Le point de départ se trouve toujours chez le médecin traitant. Lui seul peut initier la demande d’affection de longue durée (ALD). Lorsque la maladie répond aux critères d’une ALD 30, il rédige un protocole de soins, détaillant diagnostic, durée du traitement et liste des actes envisagés. Ce document, cosigné par le patient, est transmis au médecin-conseil de la Sécurité sociale pour validation.
Une fois le protocole validé, le patient bénéficie de l’exonération du ticket modérateur : plus aucun reste à charge sur les consultations, analyses, imageries ou traitements directement liés à l’ALD, dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale. Pour tout ce qui sort du cadre de l’affection reconnue, le remboursement reste classique.
Au fil du suivi, le médecin traitant délivre une ordonnance bizone. Elle distingue noir sur blanc ce qui relève de l’ALD (pris en charge à 100 %) du reste (remboursé selon les règles habituelles). Ce document simplifie la vie du patient, tout en garantissant une traçabilité des soins. En cas de refus ou de besoin de renouvellement, la discussion avec le médecin traitant est incontournable : il peut revoir le protocole ou relancer la demande auprès de l’Assurance Maladie.
À travers ces démarches, des milliers de patients voient chaque année leur quotidien allégé du poids des frais médicaux. Pour eux, l’ALD n’est pas qu’un statut administratif : c’est, bien souvent, un filet de sécurité qui permet d’avancer, malgré la maladie.