63 % des salariés en France affirment s’ennuyer régulièrement au travail. Ce chiffre, issu d’une enquête OpinionWay menée en 2023, n’épargne ni les cadres ni les jeunes recrues, ni les cols bleus ni les cols blancs.
Ce malaise, s’il passe inaperçu, peut dériver en bore-out, avec son lot de dégâts sur la motivation et la santé mentale. Pourtant, il existe des leviers simples et concrets pour freiner la spirale et retrouver un souffle nouveau au quotidien.
L’ennui au travail : un signal à ne pas négliger
Le bore-out n’arrive pas avec fracas, il s’installe à bas bruit. Là où l’on parle sans cesse de surcharge, la sous-charge, elle, grignote la motivation des salariés en silence. Ce syndrome d’épuisement professionnel ne ressemble pas au burn-out : il ne vient pas d’un trop-plein, mais d’un manque cruel de défis, d’utilité, de reconnaissance. Peu à peu, la routine s’impose, le désengagement s’enracine.
La souffrance au travail liée à l’ennui se traduit par des signaux variés : la motivation s’étiole, l’anxiété s’installe, la tristesse pointe, la confiance s’effondre. Les nuits deviennent agitées, l’absentéisme ou le présentéisme s’invitent, et le mal-être psychologique peut finir par entraîner une véritable dépression. Chez certains, le bore-out laisse une marque profonde : estime de soi en berne, sentiment d’inutilité, honte difficile à nommer tant le sujet reste tabou.
Malgré tout, le phénomène demeure méconnu et n’est toujours pas reconnu comme maladie professionnelle en France. Cette absence de statut complique la prise en compte de la souffrance des collaborateurs. Pourtant, le lien entre ennui profond et désengagement professionnel est désormais bien établi : la démotivation s’installe, la performance s’effrite, la santé mentale vacille. Aux managers et employeurs d’ouvrir l’œil, de repérer les signaux faibles, pour éviter que l’ennui ne débouche sur un bore-out sévère, ou pire, sur une dépression.
Pourquoi se sent-on ennuyeux ? Décrypter les causes et les mécanismes
L’ennui au travail ne tombe jamais du ciel. Plusieurs ingrédients s’additionnent pour faire émerger le bore-out professionnel. D’abord, une sous-charge de travail : des tâches routinières, peu stimulantes, ou trop rares. À force d’être sous-employé, chacun finit par perdre l’envie d’agir, ses compétences s’érodent faute d’exercice.
La routine monotone est un catalyseur d’ennui. Quand les journées se ressemblent, la motivation décroît. S’y ajoutent parfois une surqualification mal vécue, des profils expérimentés bloqués sur des missions répétitives ou dévalorisantes,, l’absence de perspectives, l’isolement, le manque de reconnaissance. L’ensemble mine peu à peu l’engagement.
Certains milieux de travail aggravent la situation : conflits internes, harcèlement moral, ressources insuffisantes, soutien absent. L’ennui se transforme alors en souffrance invisible. Pour beaucoup, la spirale mène à la procrastination, à la fatigue, à la tristesse ou à l’anxiété. D’autres ressentent une perte de sens totale et une démotivation persistante.
Le bore-out partage un point commun avec le burn-out et le brown-out: tous trois surgissent d’un décalage entre attentes et réalité professionnelle. Le burn-out surgit de l’excès, le bore-out du vide, le brown-out de la perte de sens. Les symptômes varient mais les conséquences convergent : frustration, perte d’estime de soi, désengagement, parfois jusqu’à la dépression.
Des pistes concrètes pour retrouver de l’intérêt au quotidien
Reprendre la main face à l’ennui professionnel passe avant tout par l’action. Multipliez les initiatives : proposez à votre manager de rejoindre de nouveaux projets, sollicitez des missions plus variées. Un échange avec les ressources humaines ou le médecin du travail peut parfois débloquer des solutions insoupçonnées, comme une mobilité interne ou un changement de poste.
Le bilan de compétences aide à faire le point sur ce qui vous anime et à tracer des pistes de développement. Une formation continue, courte ou diplômante, ravive l’envie d’apprendre et la confiance en soi. Certains salariés se relancent dans un projet personnel ou une reconversion, par exemple via le Projet de Transition Professionnelle (PTP).
Pour sortir de l’isolement et créer de nouvelles perspectives, le réseau professionnel est un atout. Discuter avec des collègues, échanger avec des pairs, permet souvent de remettre les choses en perspective et de découvrir des pistes inattendues. Pourquoi ne pas intégrer un moment de créativité ou d’apprentissage dans votre journée ? Apprendre une nouvelle compétence, réorganiser votre espace de travail, lancer un défi collectif : autant d’options pour briser la routine.
La santé psychologique mérite aussi toute votre attention. Accordez-vous des pauses, pratiquez la méditation, bougez davantage, cultivez la gratitude. Agir, même en dehors de la sphère professionnelle, fait souvent la différence. Sortir de l’ennui, c’est aussi s’autoriser un pas de côté, modifier ses habitudes, ou tenter des expériences inédites.
Prévenir le bore-out et améliorer durablement son bien-être professionnel
Prévenir le bore-out exige que chaque acteur de l’entreprise se sente concerné. Employeurs et managers ont une carte à jouer : surveiller la charge de travail, repérer rapidement les collaborateurs sous-occupés ou désengagés. Le manque de missions stimulantes ou d’objectifs professionnels clairs explique que tant de salariés traînent des pieds. Un management attentif, qui valorise les initiatives et la reconnaissance, crée un climat propice à l’engagement.
Pour renouveler les compétences et entretenir la motivation, la formation continue est un formidable levier. Encourager la prise d’initiative, déléguer davantage, confier des projets transverses : voilà comment responsabiliser les équipes, limiter la routine et renforcer le bien-être professionnel.
L’engagement se nourrit aussi de projets stimulants et d’une communication ouverte. Quand chacun peut évoquer son vécu, ses envies ou ses difficultés, l’accompagnement devient plus pertinent. La reconnaissance, même sur de petits succès, aide à combattre le sentiment d’inutilité qui accompagne le bore-out.
En misant sur ces axes, l’entreprise réduit les risques d’absentéisme, de baisse de productivité et de démotivation collective. Le bien-être au travail n’est alors plus un slogan, mais un moteur de fidélité et de performance pour toute l’équipe.
Reste à chacun d’oser briser la routine, d’ouvrir la porte à l’inattendu, et de réinventer son quotidien professionnel. Le premier pas, parfois, c’est simplement de reconnaître l’ennui, pour mieux s’en libérer.


